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Être enseignant en 2020, ça donne quoi ?

Enactus Lycéens pédagogie expérientielle

Aujourd’hui, lundi 5 octobre 2020, c’est la journée mondiale des enseignants. Un métier que nous connaissons tous, avec lequel nous avons tous été en contact. Pourtant, avons-nous vraiment connaissance et conscience des enjeux de ce métier ? Comment les enseignants vivent leur quotidien, leur relation aux élèves, à l’école, à l’éducation ?

Nous sommes allés à la rencontre de Cristelle Rage et Nicolas Maugan, tous deux enseignants en lycées professionnels dans la région parisienne et engagés avec Enactus depuis plusieurs années.

Le métier d’enseignant est l’un des plus vieux métiers du monde. Sa naissance remonte au Moyen Âge avec l’apprentissage de la musique ou encore des prières. Cette profession a pourtant beaucoup évolué depuis son apparition ; à travers les nouvelles matières, les différents niveaux d’enseignement, l’arrivée des nouvelles technologies, l’apparition de nouvelles formes éducatives, etc.

Bref, l’enseignant s’adapte aux évolutions de la société pour répondre à la fois aux enjeux éducatifs et aux objectifs personnels des futures générations. Et aujourd’hui, avec toutes ces évolutions apparues au fil des siècles, comment pourrions-nous décrire le métier d’enseignant et son utilité ?

L’enseignement, un métier avant tout social

Cristelle Rage est enseignante d’Eco-Gestion dans le lycée professionnel Camille Claudel à Mantes-la-Ville depuis 16 ans. Elle nous explique qu’aujourd’hui “ la connaissance, elle est à un clic pour tout le monde.”

Finalement, le rôle de l’enseignant ne s’arrête pas à l’apprentissage d’une matière mais s'apparente davantage à un rôle d’éducateur. Il est, comme nous l’explique Nicolas Maugan, enseignant d’Eco-Gestion dans le lycée Charles Baudelaire à Fosses depuis 14 ans, un métier avant tout basé sur le social. “On a des jeunes pour qui le contact est très important. Ils sont beaucoup dans l’affect !”, nous dit Cristelle.  “Le fait d’être présent, de discuter avec les élèves, le fait de s’intéresser à eux, d’être disponible et le fait qu’ils aient le sentiment d’être respectés et valorisés et qu’il y ait quand même des règles ça leur permet de se dire “on ne me laisse pas tomber”” ajoute Nicolas.

Ils nous font part de l’importance de créer une relation de confiance avec leurs élèves afin d’exercer leur métier, ce qui donne d’ailleurs du sens à leur profession au quotidien. “On les voit beaucoup, plusieurs heures par semaine pendant 3 ans et il y a un vrai lien [qui se crée], on les connait très bien !” nous explique Cristelle. Avec 10 ou 12h de cours par semaine ensemble, c’est inévitable de ne pas les connaître. Et comme nous le dit Nicolas, “c’est dans cet aspect là que je me sens utile : au travers du regard de mes élèves et qu’ils me fassent confiance. On gère de l’humain. On ne peut pas espérer de la rentabilité avec de l’humain. Les chiffres de réussites à l’examen c’est intéressant. Mais ce n’est pas ce pourquoi je me lève le matin, même si c’est la transmission d’un savoir, c’est l’utilisation d’une pédagogie pour permettre aux élèves de progresser, là ça fait parti de mon travail mais ce n’est pas le coeur de mon métier”. Le coeur de son métier, c’est la relation avec ses élèves.

Et cela commence par des choses simples. Un bonjour avec le prénom, un regard. “Cela permet de prendre la température”, d’évaluer s’il y a un problème. Au fur et à mesure de l’année ,un lien fort se crée inévitablement entre l’enseignant et l’élève : “Je vous mets au défi vous avec vos propres collègues de passer 8h et qu’il ne se crée rien. Et bien nous c’est la même chose mais ce sont des élèves.”

Nicolas nous explique que la transmission des connaissances passe aussi par le fait de connaître son public. Ils insistent tous les deux sur le double apprentissage de cette relation. Effectivement, l’enseignant apporte des connaissances, des savoir-être, des savoir-faire à l’élève. Mais l’inverse existe également.

“Ils [les élèves] ont plein de choses à nous apprendre ! Humainement, ils ont plein de choses à donner et à partager !”

Finalement, “c’est un métier d’échanges.”

Comment appréhender les nouvelles formes pédagogiques ?

Nous sommes revenus ensemble sur les nouvelles formes de pédagogies existantes et les problématiques rencontrées en tant qu’enseignant : classe inversée, utilisation des ressources numériques et, plus récemment travail à distance. Nicolas nous dit “il faut oser” !

Les deux enseignants reviennent aussi sur les difficultés à appliquer ces nouvelles pédagogies. En effet, ils témoignent de ces barrières qu’ils rencontrent quand ils veulent développer de nouveaux projets, barrières à la fois organisationnelles, financières, matérielles, techniques… “On n’a pas les moyens d’adapter nos pratiques comme on le voudrait !”. Les moyens pour  tester les nouvelles façons d’apprendre arrivent toujours avec un temps de retard.

“Il y a toujours un temps où l’on doit faire sans, et quand on fait sans, on fait moins bien.”

S’ils avaient tous les deux une baguette magique, la première chose qu’il ferait c’est réduire les effectifs de leur classe à 10 élèves “pour fonctionner en projet”. D’autres idées émergent : “Si j’avais une baguette magique, j’aurai un minibus pour aller faire des visites d’entreprises, des sorties, des projets”

Cristelle et Nicolas testent tous les deux de nouvelles formes d’enseignement avec leurs élèves. Cristelle nous explique qu’elle a maintenant du matériel facilement adaptable pour proposer des projets de groupe (tables, chaises).

Depuis 4 ou 5 ans, ils sont également engagés avec Enactus afin de proposer à leurs élèves une pédagogie expérientielle autour de l’entrepreneuriat social, de l’économie sociale et solidaire (ESS) et des objectifs de développement durable (ODD). “C’est clé en main, bien fait et c’est cohérent avec notre programme”.

En intégrant Enactus, “je me suis dit que c’est par les ODD que j’allais prendre plaisir avec mes élèves” nous dit Cristelle. “J’ai décidé que dans mes cours, j’aurais des entrées que par les ODD”.

Nicolas, quant à lui, a cette sensation que l’Education Nationale est le reflet de notre société. “J’ai l’impression que les élèves sont de plus en plus informés [sur ces questions sociétales]. On arrive grâce à l’ESS à leur montrer un éventail plus important [de solutions et de métiers]”.

L’économie sociale et solidaire représente aujourd’hui 2,3 millions de salariés en France. Grâce à Enactus Lycéens, les élèves prennent connaissance de ce secteur, des enjeux sociaux et environnementaux de leur territoire et quartier, rencontrent des professionnels (entrepreneurs ou salariés) et découvrent qu’ils peuvent agir à leur échelle et se projeter également dans certains métiers de l’ESS. 

Confinement et rentrée 2020, ça se passe comment ?

En mars dernier, l’annonce du confinement général a mis l’éducation en difficulté. Plus d’école en présentiel, les élèves étaient à distance. De nombreux enseignants ont déployé des moyens d’ingéniosité pour subvenir aux besoins de leurs élèves, tant sur le plan matériel que sur le plan éducatif. “Ca n’a pas été anticipé donc, [au vu du contexte], je trouve que l’on a été assez réactif que ce soit les professeurs ou les élèves. On a trouvé des solutions assez rapidement”.

Par exemple, Cristelle nous explique qu’elle est restée en contact avec ses élèves grâce à whatsapp. D’autres enseignants ont créé des boucles snapchat ou encore ont lancé des chaines youtube pour s’adapter aux pratiques des jeunes.

Pour certains élèves, l’une des difficultés principales a été le manque de cadre, de repères, de lien direct ce qui a rendu très difficile la continuité pédagogique: “Ils ont pris conscience de toute la plus value que l’on pouvait avoir à être devant eux dans une salle de cours” nous explique Nicolas. Cristelle nous donne un exemple :

“Sur mes secondes, classe de 30 élèves. Fin du confinement, 3 personnes devant la caméra”.

Après cette expérience et la poursuite de la crise sanitaire liée à la COVID-19, les établissements anticipent la possibilité d’un nouveau confinement. “On a expliqué [aux élèves] comment ça se passerait si un nouveau confinement arrivait et on essaie de donner du travail à distance.”

Par exemple, plutôt que de rendre le travail en main propre, Nicolas propose à ses élèves de déposer leur rendu sur pronote, la plateforme mise en place par le gouvernement, ou de lui envoyer les éléments par mail. “C’est une façon de continuer à travailler l’enseignement à distance”.

L’objectif est que chacun, élève comme enseignant, ne soit pas pris au dépourvu si un nouveau confinement a lieu.

Cristelle et Nicolas ne cachent pas la difficulté de reprendre le rythme de l’école pour leurs élèves. Le port du masque ajoute une complexité à l’apprentissage. Les élèves ont davantage de mal à se concentrer pendant longtemps. Mais de manière générale, les deux enseignants nous font part de la gestion de cette situation par leur élèves : “ils la gèrent plutôt bien. Je ne sais pas si, à leur âge, j’aurais pu le gérer aussi bien qu’eux”.

Être enseignant aujourd’hui, ce n’est donc plus seulement transmettre un savoir, c’est aussi un métier social, beaucoup de partages et une adaptabilité aux besoins et aux nouveaux modes de vie de ces jeunes générations.

Les enseignants avec qui nous avons échangé apportent beaucoup d’importance à la relation entre l’enseignant et l’élève. En plus de leur métier, ils se fixent personnellement d’autres missions. Nicolas par exemple est également référent de la lutte contre le décrochage scolaire dans son établissement. Cristelle s’occupe en parallèle de la section européenne et est formatrice académique.

Ils aiment transmettre, sont passionnés par leur métier et encore plus par leurs élèves.

L'équipe d'Enactus prend toujours beaucoup de plaisir à échanger, former et accompagner les élèves et leurs enseignants dans la mise en place d’une pédagogie expérientielle au sein même de leur classe.

Alors pour cette journée mondiale des enseignants, quoi de plus logique que de mettre en avant leurs actions et leur engagement !

Ils participent
Cristelle Rage

Cristelle Rage

Enseignante
Lycée Camille Claudel
Mantes-la-Ville
Nicolas Maugan

Nicolas Maugan

Enseignant
Lycée Charles Baudelaire
Fosses